Episodios

  • #Moustiques, une pièce sur le harcèlement qui fait mouche
    Jul 20 2025

    Le spectacle « #Moustiques », texte et mise en scène de Julien Oppert, est présenté au festival off d’Avignon jusqu’au 26 juillet 2025. Elle raconte le harcèlement à travers une kyrielle de personnages joués par quatre comédiens.

    Promoteur d’un « théâtre citoyen », l’auteur et metteur en scène Benjamin Oppert, après « Je rêvais d’un autre monde » destiné à sensibiliser le grand public à l’autisme, récidive avec #Moustiques, consacrée cette fois au harcèlement scolaire. Une commande d’écriture du Conseil départemental de Seine-et-Marne, soucieux de proposer un texte aux collégiens, dans le cadre des ateliers de théâtre-forum.

    Sur le plateau de l’Espace Alya pendant le Off du festival d’Avignon 2025, quatre comédiens (Magali Faure, Günther Vanseveren, Géraldine Moreau-Geoffrey et Olivier Troyon) incarnent une vingtaine de personnages, des adolescents et des adultes confrontés comme harceleurs, témoins ou victimes, à ce fléau.

    Tous les types de harcèlement (physique, moral, verbal, sexuel, cyberharcèlement) sont ainsi abordés de façon très concrète à travers des scènes de la vie quotidienne à l’école, en famille, mais aussi dans le monde de l’entreprise. Non sans quelques petits clins d’œil humoristiques qui apportent des respirations bienvenues. Ne serait-ce que les prénoms des personnages : Olive et Tom font référence à une série télévisée d’animation japonaise créée dans les années 80, Léo et Maya à une série de livres pour enfants mettant en scène deux jeunes détectives.

    En 2024, plus de 600 000 élèves français se sont dit victimes de harcèlement scolaire. La tranche d’âge la plus touchée est celle des années collège. Selon un sondage OpinionWay pour l'Observatoire Hexagone, 87% des enseignants déclarent aussi avoir été témoins ou informés d'au moins un fait de violence dans leur établissement pendant l'année scolaire 2024-2025. Depuis la loi du 2 mars 2022, ce phénomène est reconnu comme un délit, qui se définit comme une violence répétée qui peut être verbale, physique ou psychologique. Avec l’utilisation permanente des téléphones portables, des messageries instantanées et des réseaux sociaux numériques, le harcèlement se poursuit souvent au-delà des heures scolaires : la victime n’a alors plus de répit ou presque.

    En France, le 30.18 est devenu depuis le 1er janvier 2024 le numéro national unique de signalement des situations de harcèlement et de cyberharcèlement entre élèves. Géré par l’association e-Enfance, ce numéro vert (appel gratuit, anonyme et confidentiel, accessible 7 jours sur 7 de 9 h à 23 h – jours fériés inclus) permet aux jeunes de signaler les situations problématiques et de bénéficier d’une écoute.

    #Moustiques, texte et mise en scène de Benjamin Oppert, à l’Espace Alya (Avignon Off) jusqu’au 26 juillet 2025.

    À écouter aussiHarcèlement scolaire: «J'ai eu trop peur, je me suis dit que j'allais mourir»

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  • La Méditerranée, c’est toute une mer à boire
    Jul 19 2025

    Dans un docu-album érudit et didactique, le dessinateur Aurel part à la recherche de ce qui fait et a fait la Méditerranée.

    Qu’est-ce qu’être Méditerranéen ? C’est pour répondre à cette question, qu’Aurel, né dans les Cévennes, mais installé à Montpellier après quelques années en Espagne, s’est lancée dans l’aventure de cet album dont le sous-titre « Histoires d’un continent kaléidoscopique », décrit parfaitement le contenu. Car la « Mare Nostrum » de l’Empire romain se conjugue au pluriel.

    Le récit conjugue témoignage d’experts et fiction à travers deux personnages récurrents : côté fiction, Omar, un étudiant en histoire qui quitte l’Éthiopie au péril de sa vie pour gagner l’Angleterre, à l’instar des nombreux migrants dont les disparitions tragiques en Méditerranée se retrouvent régulièrement au cœur de l’actualité. L’une des premières séquences de l’album y fait d’ailleurs explicitement référence : dans la même eau bleue, certains se baignent et passent du bon temps, d’autres se noient.

    Côté documentaire, Aurel se met lui-même en scène, évoquant ses racines familiales -son enfance au bord du Chassezac en Ardèche, mais aussi ses vacances familiales à la Grande Motte- mais aussi retranscrivant des dialogues fournis, plein d’éruditions avec les éminents spécialistes qu’il a interrogés : les historiens Patrick Boucheron, Guillaume Calafat, Delphine Diaz, M’hamed Oualdi, le linguiste Louis-Jean Calvet… Tous évoquent la complexité de la réalité, et leurs analyses bousculent bien des idées reçues, souvent véhiculées par un ethnocentrisme teinté de (néo)colonialisme.

    À noter également une étonnante discussion d’outre-tombe avec le fondateur de l’École des Annales et auteur du livre-référence « Méditerranée », Fernand Braudel. Mais Aurel met aussi en scène une discussion entre son personnage et un trio de chanteuses : l’Israélienne Yaël Naïm, l’Espagnole Sylvia Perez Cruz et la Tunisienne Emel Mathlouthi. Sur fond de papier quadrillé qui rappelle les cahiers d’écoliers, Aurel dessine aussi de nombreuses cartes et frises chronologiques pour montrer les permanences et les évolutions de l’espace méditerranéen.

    Par le truchement des mots et des dessins, Aurel retrace ainsi, de Sète à Malte en passant par Valence et Marseille, dans quelle mesure la Méditerranée est le berceau de l’agriculture, mais aussi des alphabets et des trois grandes religions monothéistes ; relate les conflits et les mouvements de population, mais aussi le développement du commerce ; et donne l’eau à la bouche en évoquant les savoureuses spécialités gastronomiques de cette région d’une richesse incommensurable. Même si LE plat véritablement méditerranéen n’existe pas.

    Méditerranée, histoires d’un continent kaléidoscope, Aurel (Futuropolis).

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  • Alexeï Navalny, rendez-vous avec la mort
    Jul 13 2025

    Dans le Off d’Avignon, au Théâtre des Halles, Sabrina Kouroughli et Gaëtan Vassart mettent en scène et jouent Alexeï et Yulia, une joute verbale aux allures de tragédie grecque inspirée de faits réels.

    Dans Patriote, son autobiographie, publiée en français quelques mois après sa mort en octobre 2024 chez Albin Michel, Alexeï Navalny retrace l’histoire complète de sa vie : sa jeunesse en Union soviétique, son amour éternel de la Russie, l’éveil de sa conscience politique et son activisme contre le régime de Vladimir Poutine, sa relation avec sa femme Yulia et sa famille, et ses années de détention. Le livre a beaucoup touché Sabrina Kouroughli et Gaëtan Vassart. Ils ont un temps pensé à l’adapter au théâtre, mais ils ont finalement choisi de s’engouffrer dans un interstice laissé par l’opposant russe : leur choix de rentrer à Moscou en janvier 2021, malgré les risques d’arrestation.

    C’est donc à cette soirée du 16 janvier 2021 que les deux coauteurs, également comédiens et metteurs en scène de ce spectacle à l’affiche du Théâtre des Halles dans le festival Off d’Avignon. A ce moment-là, le couple est à Berlin. C’est dans la capitale allemande, à l’hôpital de la Charité, que l’opposant russe a été placé dans le coma, qu’il a été soigné et qu’il a fini par se remettre de son empoisonnement au Novitchok, un agent neurotoxique probablement administré lors d’un voyage en avion entre les villes russes de Tomsk et Moscou.

    A peine remis sur pied, Navalny décide de rentrer à Moscou. Son épouse Yulia essaie en vain de le dissuader. Le spectacle nous fait assister à cette joute verbale entre ces deux personnages animés aussi bien par la passion amoureuse que par leur combat pour la liberté. Faut-il affronter le danger ou résister depuis l’exil ? Ne pas se rendre à Moscou serait-il considéré comme une lâcheté voire une trahison ? La lucidité ne conduit-elle pas à renoncer et à continuer à vivre pour se battre ?

    Dans la chapelle Sainte-Claire du Théâtre des Halles, l’espace scénique dépouillé – un sol rouge, des bancs en bois, une guitare et une couverture- met en valeur la force des mots et le combat intime et politique en même temps que se livrent les deux protagonistes.

    Les arguments pleuvent dans ce huis clos aux allures de tragédie grecque. Un affrontement à la fois tendu et plein de tendresse, traversé de quelques traits d’humour, et qui incite le spectateur à une réflexion sur l’engagement et le courage.

    Alexeï et Yulia, écriture, mise en scène et jeu de Sabrina Kouroughli et Gaëtan Vassart, Théâtre des Halles (Avignon) du 5 au 26 juillet à 14h (relâche les mercredis 9.16 et 23 juillet).

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  • Le futur a-t-il encore un avenir ?
    Jul 12 2025

    La pièce de théâtre Y a plus qu’à, texte et mise en scène de Julien Guyomard, à l’affiche du festival off d’Avignon, interroge l’avenir écologique de la planète. Un étonnant et joyeux mélange entre prospective scientifique et autodérision.

    Y a plus qu’à… La formule qui sert de titre à la pièce laisse entrevoir l’ironie qui entoure ce spectacle qui incite à réfléchir aux enjeux et aux solutions d’avenir dans une atmosphère joyeuse et revigorante, malgré l’éco-anxiété. En témoigne également le sous-titre : « que faire lorsque tout est trop grand pour nous ».

    Mais que l’on ne s’y trompe pas : pour écrire le texte, Julien Guyomard a rencontré une kyrielle de prospectivistes chercheurs et scientifiques (physicien, urbaniste, philosophe, économistes, géographe, spécialiste en biogéochimie… rattachés au CNRS, à l’IRD, ou à des universités…). Avec la codirectrice de la compagnie Scena Nostra Elodie Vom Hofe, il a ensuite théâtralisé ces matériaux scientifiques pour les exposer, les questionner, et montrer aussi leurs limites, souvent de manière ludique et amusante : car bien plus que l’angoisse, c’est l’humour et ses épigones, l’absurde, le ridicule, l’ironie et l’autodérision qui irriguent le spectacle. Quelques surprises aussi.

    Quel avenir écologique pour la planète ? C’est la grande question que doivent affronter les personnages du spectacle dans cette narration éclatée qui commence par une mise en abyme, puisque la première scène présente au public une troupe de comédiens qui prépare un spectacle… sur l’avenir écologique !

    Y a plus qu’à passe en revue quelques-uns des scénarios fréquemment évoqués : la fameuse « planète B », le survivalisme, ou la foi inextinguible dans le progrès comme une solution de facilité. Elle évoque aussi les petits gestes du quotidien, les questions du travail et du management, de la (sur)production et de la (sur) consommation, et pose à travers elles la question de l’avenir du capitalisme. Elle pose également la question des moyens d’action et de l’utilisation de la violence. Elle s’attarde enfin sur les débats autour de la démocratie et de la prise de parole au sein d’un groupe : le fil rouge des créations de la compagnie est d’ailleurs résumé par la question « qu’est-ce que « faire communauté » ? », en mêlant prospective et comédie.

    Y a plus qu’à, écrit et mis en scène par Julien Guyomard, avec Magaly Godenaire, Julien Cigana, Damien Houssier, Renaud Triffault et Elodie Vom Hofe, Théâtre du Train Bleu pendant le Festival d’Avignon jusqu’au 24 juillet, relâche les vendredis.

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  • Handicap et accompagnement sexuel, un tabou sur les planches
    Jul 6 2025

    La pièce de théâtre « Toutes les autres », créée le 5 juillet 2025 au festival off d’Avignon, porte sur un sujet délicat : l’accompagnement sexuel des personnes en situation de handicap.

    Sur la scène du théâtre Artéphile à Avignon, l’autrice, Clotilde Cavaroc et la metteuse en scène Elise Noiraud nous mettent en présence de deux personnages : Clémence (Kimiko Kitamura), en fauteuil roulant depuis un terrible accident de voiture, et Antoine (Stéphane Hausauer), infirmier à l’hôpital de son métier mais aussi accompagnant sexuel expérimenté, formé en Suisse. C’est elle qui fait appel à lui, qui propose des caresses, des massages, des jeux érotiques et des rapports sexuels consentis. Antoine insiste beaucoup sur la question du consentement : c’est la raison pour laquelle il exclut par principe les handicaps mentaux. Il n’accepte pas non plus les relations avec les moins de 30 ans en raison de l’écart d’âge -lui a 47 ans-. Autre règle importante : garder de la distance (il n’embrasse pas) et proscrire toute dépendance affective.

    La pratique de l’ « accompagnement » - ou de « l’assistance » - sexuelle aux personnes en situation de handicap est apparue dans les années 70 aux États-Unis ; elle s’est étendue sous des formes assez différentes dans plusieurs pays européens : aux Pays-Bas, en Allemagne, au Danemark ou en Suisse, elle est légale et encadrée. En France, proposer des services sexuels moyennant rétribution -y compris à une personne en situation de handicap- est considérée comme de la prostitution, et mettre en relation les deux protagonistes comme du proxénétisme. Il y a pourtant des associations qui militent pour que changent les regards et la législation. C’est le cas de l’Association Pour la Promotion de l’Accompagnement Sexuel, dont un des membres témoigne en off au début du spectacle, et qui ne parle pas de clients, mais de « bénéficiaires ».

    D’autres associations, comme le Collectif Luttes et Handicaps pour l’Égalité et l’Émancipation, fondée par l’avocate Elisa Rojas, avancent des contre-arguments, dénonçant le caractère marchand de la prestation, mais aussi une démarche incompatible avec l’objectif d’autonomisation des personnes en situation de handicap. Mais le débat n’a jamais véritablement commencé auprès du grand public, tant la question semble taboue. Même si en 2020, la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées a adressé un courrier au président du Conseil Consultatif National d’Éthique (CCNE) dans lequel elle expliquait que s’ouvre « une réflexion éthique en abordant le sujet de l’assistance sexuelle avec une vision renouvelée ».

    Toutes les autres, de Clotilde Cavaroc, mise en scène d’Elise Noiraud, au Théâtre Artéphile à Avignon du 5 au 26 juillet 2025 (relâche les dimanches).

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  • André Bouny, des nouvelles du Vietnam
    Jul 5 2025

    Dans un recueil de 13 histoires, l’écrivain, peintre et militant engagé André Bouny raconte la souffrance et la résilience des Vietnamiens contre toutes sortes d’adversités.

    Né dans une famille rurale du sud de la France, André Bouny proteste pendant ses études à Paris contre la guerre du Vietnam. Profondément ému par la découverte des ravages sur ce pays, notamment à travers les dégâts causés par l’agent orange, il devient père adoptif d’enfants vietnamiens, et ne cessera de s’engager pour la paix, notamment contre les mines anti-personnel et en soutien des victimes de l’agent orange. Il est d’ailleurs l’auteur d’un livre de référence sur ce dossier, L’Agent Orange : Apocalypse Vietnam (éditions Demi-Lune), qui a permis la tenue d’un procès en 2014 au nom d’une victime française d’origine vietnamienne, Tran To Nga. André Bouny est aussi le fondateur de l’association caritative DEFI Viêt Nam en 1999 et du Comité international de soutien aux victimes vietnamiennes de l’agent orange (CIS). En mars 2007, il intervient à ce sujet lors de la 4è session du Conseil des Droits de l’Homme des Nations unies, et continue inlassablement depuis à expliquer les conséquences de ce poison, que l’on rencontre à plusieurs reprises dans ce recueil de nouvelles.

    Les Neuf fils de Madame Thu réunit treize nouvelles qui racontent le Vietnam du XXè et du XXIè siècle, de la colonisation française jusqu’à nos jours. À travers des scènes de la vie quotidienne, l’auteur nous plonge dans l’atmosphère chaude et humide du pays d’Asie du Sud-Est, terre de typhons et de moussons, de forêts et de rizières, où la nature et le climat sont rudes.

    André Bouny raconte les violences sociales au sein d’une plantation de caoutchouc de l’époque coloniale et nous emmène ensuite sur le grand marché aux coolies d’une île de l’archipel d’Ha Long. Il nous conduit aussi dans un village de pêcheurs de la province de Quang Ngai (centre), ou encore aux côtés d’un conducteur de cyclo-pousse d’Hô Chi Minh-Ville qui peine à gagner sa vie.

    Plus étonnant : l’auteur imagine un voyage clandestin d’un pape au Vietnam, à bord d’un « papabateau » construit dans le plus grand secret, baptisé « Ile Vaticane ». Le Vietnam compte quelque 5.5 millions de catholiques, une des communautés les plus nombreuses d’Asie du Sud-Est après les Philippines. Sous le pontificat du pape François, le dialogue bilatéral entre Rome et Hanoï avait fait de nombreux progrès, et le souverain pontife avait dit à plusieurs reprises sa volonté de se rendre au Vietnam.

    Des récits à hauteur d’hommes et de femmes, empreints d’une injustice venue d’ailleurs : notamment celle des colons français, des soldats de l’armée des États-Unis ou encore des navires de pêche chinois. La lutte permanente du pot de terre contre le pot de fer. Mais toujours le même courage, la même dignité et la même force de vie face à l’adversité.

    Les Neuf fils de Madame Thu, André Bouny (Éditions du Canoë).

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  • Les Gorilles du Général, les cerbères et le pépère
    Jun 29 2025

    Dans une nouvelle série de bande dessinée, Les Gorilles du Général, Julien Telo et Xavier Dorison racontent la présidence de Gaulle vue par ses gardes du corps. Un régal.

    Qui n’a pas rêvé de se transformer en petite souris pour vivre les grands épisodes de l’Histoire dans l’ombre des grands hommes ? À travers cette nouvelle série de bande dessinée, Xavier Dorison et Julien Telo ont préféré les gorilles aux rongeurs : les gardes du corps du président de la République, le général de Gaulle en personne ! Quatre cerbères en costumes-cravate, tous anciens de la Résistance, qui veillent sur un chef d’État en proie à de lourdes menaces.

    Car en ce mois de Septembre 1959, titre du premier volet de cette série sobrement baptisée Les Gorilles du Général (Casterman), la toute jeune Vè République fait face à la flambée de violences liées à la guerre d’Algérie (1954-1962) qui s’étendent sur le territoire métropolitain.

    Pour rédiger son scénario, Xavier Dorison a rencontré Raymond Sasia, le dernier « gorille » de Charles de Gaulle encore en vie. L’histoire racontée dans l’album est inspirée de faits réels et de personnages placés dans un contexte réel, mais elle n’en reste pas moins une fiction : ni les dialogues ni les actes des quatre principaux protagonistes ne sont le reflet de la réalité, même si chacun d’eux a des points communs avec les vrais gardes du corps du Général. Le dossier placé à la fin du livre permet de faire le tri. Et de constater la véracité des bons mots que les auteurs placent dans la bouche du président, dont on constate avec amusement le sens de l’humour et l’étendue de la culture (classique).

    Les dialogues à la Audiard et les dessins de Julien Telo résonnent de l’atmosphère des années 50-60 et les quatre principaux personnages en sont aussi le reflet. Ange Santoni (dérivé du célèbre Paul Comiti), Corse d’une fidélité à tout épreuve, a un fils qui sert en Algérie parmi les appelés du continent ; Alain Zerf (alias Hento Hachmi D’Jouder) et sa famille sont tiraillés entre son patriotisme et ses origines familiales kabyles, d’autant plus que sa sœur et son beau-frère sont restés à Mostaghanem ; Max Milan (le personnage inspiré par Raymond Sasia) est ceinture noire de judo et parachutiste ; quant à Georges Bertier (inspiré par Roger Tessier), il pratique la boxe.

    Ces quatre mousquetaires ont été recrutés et sont directement rattachés à l’éminence grise de l’Elysée, Jacques Foccart en personne, surnommé « Le Chanoine ». Charles de Gaulle a lui aussi un surnom : entre eux, les gorilles l’appellent « Pépère » un sobriquet plein d’affection qu’ils se gardent évidemment de prononcer en sa présence.

    Les Gorilles du Général, Septembre 1959, de Julien Telo et Xavier Dorison (Casterman).

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  • Avec François Cusset, Elon Musk s’en tire à bon conte
    Jun 28 2025

    « Petit Musc, comptes et légendes », de l’historien des idées et spécialiste des États-Unis François Cusset, raconte Elon Musk à la façon d’un conte médiéval.

    François Cusset est historien des idées et professeur de Civilisation américaine à l’Université de Paris-Ouest Nanterre, auteur de plusieurs essais consacrés à l’histoire intellectuelle et politique contemporaine, mais aussi de fictions, souvent liés d’ailleurs à ses recherches.

    Le voici de retour en librairies avec un personnage au cœur de l’actualité américaine de ces dernières années : le milliardaire, chef d’entreprises mais aussi homme politique proche de Donald Trump, Elon Musk.

    Pour raconter son enfance, son ascension, ses ambitions et sa soif de pouvoir sans limites, l’écrivain l’a renommé « Petit Musc », et transpose le récit de sa vie sous forme de conte du Moyen-Age, imitant le langage médiéval et les mœurs féodales.

    De sa naissance à Pretoria, dans l’Afrique du Sud de l’apartheid jusqu’à son bilan à la tête du DOGE (Department of Government Efficiency) et sa relation avec Donald Trump -rebaptisé Le roi La Trompe dans le roman, l’auteur retrace les différentes réalisations de l’ambitieux personnage : le lancement de la banque en ligne X.com, le succès de la société de paiement en ligne Paypal, et bien évidemment le rachat de Tesla, constructeur américain de voitures électriques (fondé par Martin Eberhard et Marc Tarpenning) dont il fera le fer de lance de son succès. Se dégage l’impression d’un enfant avide de réaliser ses rêves d’innovation, perfectionniste et grand travailleur, mais peu soucieux du bien-être de ses collaborateurs et de ses ouvriers. Avec aussi quelques échecs comme l’Hyperloop, un système de transport ferroviaire à très grande vitesse, sous la forme d’un double tube à basse pression à l’intérieur duquel circuleraient des capsules entre le centre de San Francisco et le centre de Los Angeles.

    François Cusset évoque aussi Neuralink, la start-up en neurotechnologie et transhumanisme fondée par Elon Musk en 2016, et le rachat de Twitter (bientôt rebaptisé X par Musk, et que le romancier désigne sous le nom plus poétique d’ « Oiseau Bleu »). Il montre à quel point l’intérêt du milliardaire pour les nouvelles technologies se traduit aussi par une volonté de contrôler le cerveau non seulement de ses concitoyens, mais aussi de l’ensemble des habitants de la planète.

    Mais les ambitions de « Petit Musc » ne se cantonnent évidemment pas à la Terre, loin s’en faut : la planète Mars est en effet dans les radars de sa société spatiale SpaceX. Persuadé que l’homme aura les moyens un jour non seulement d’atteindre, mais également de coloniser la planète rouge, c’est aujourd’hui sa nouvelle frontière. Si tant est que le personnage accepte l’idée de borner ses ambitions.

    Petit Musc, comptes et légendes, François Cusset (Éditions des Busclats).

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